Samedi 19 mars 2016

Pascal Mary assurait la première partie de Juliette Gréco dans la Drôme. Il s'est de nouveau assis derrière son piano, un peu étonné de découvrir qu'un lieu comme le cabaret L.Musica pouvait exister quelque part à deux heures de Paris.

Un lustre hors d'âge pendu au-dessus de sa tête, sa valise sur le lit et le chien de la maison confortablement installé dans un fauteuil, Pascal Mary nous a reçu quelques minutes avant d'entrer en scène. Surpris et ravi à la fois, de découvrir cette loge – chambre où il passerait ensuite la nuit. « La salle est super, c'est assez étonnant, glissait-il, dans un sourire qui ne le quitterait plus : Je n'ai jamais été aussi près du public ».

Lorsqu'il s'est glissé au piano, à quelques dizaines de centimètres des premiers visages, les ondes positives n'ont pas demandé leur reste. Et le public, un peu confiné il est vrai, n'a eu qu'à se laisser glisser dans l'univers poétique de Pascal Mary, emporté par ses « questions existentielles », ses souvenirs de dimanches en Normandie, « entre le bon Dieu le matin et Jacques Martin l'après-midi ». Au rythme d'un accord monotone, on le croit volontiers lorsqu'il affirme qu'« en riante Normandie, c'est pas tous les jours qu'on rit ». Alors, « vivement lundi ».
A fleur de peau et du jazz dans le tempo, l'auteur-compositeur parisien emporte tout sur son passage. Pascal Mary est là pour se faire plaisir, peut-être un peu pour sa thérapie aussi, lui qui dit avoir déjà donné. « 15 ans de psychanalyse », tout de même.Derrière son clavier, mais aussi en aparté, il assure le show. « Le son, ça va ? Je ne dérange pas trop les sonotones ? », lance-t-il entre deux chansons, comme un coup de pied balancé aux derniers tabous. Devant son public, plus sexagénaire que trentenaire, l'auteur de « Tout compte fait », son dernier album, va jusqu'à chanter « La canicule » vue par un cabot. La chute ? Un simple « ouaf », mais la salle a bien compris l'issue de cette « chanson rafraîchissante ». Et elle se marre. Plus encore, lorsque Pascal Mary s'improvise compositeur de « chansons pour enfants », réveillant « la Anne Syvelstre qui sommeille en (lui) ». En l'entendant entonner : « Ma petite sœur, qu'est-ce qu'elle est chiante. La petite sœur qu'est dans le congélateur… », le public grince de plaisir.
Cinglant, mais aussi poétique et mélancolique, tout à la fois, Pascal Mary passe de l'inceste à l'amitié Facebook, du sentiment d'être « assis seul au bord du monde » à ses amours au masculin. Seul au piano, il écorche, lui qui semble écorché vif. Mais c'est pour mieux virevolter ensuite, dans un magistral pied de nez musical à la vie. Transporté et conquis, comme le fut avant lui Catherine Mathély lorsqu'elle a découvert Pascal Mary lors du dernier festival d'Avignon, tout ce petit monde s'est laissé transporter jusqu'au bout de la nuit, de rappel en rappel et de composition en reprise. « Formidable », s'accordera la salle au final, avant de chanter à son tour avec ce « fou » qui chante droit au cœur.